La justice est-elle armée pour protéger les artiste victimes de cyberharcèlement ?

19 janvier 2023 à 17h23 par Sophie DIAS

La justice veut la mort de nos artistes ?

Crédit : Pexels / Josie Stephens

On imagine le plus souvent que la vie d’artiste est remplie de bonheur et de moments de joie...  Mais il arrive aussi qu'ils soient vicimes de harcèlement, qu’ils lancent un appel à l'aide en ayant recours à la justice et que cette bouteille à la mer soit pas ou trop peu prise en compte. On a décidé de revenir sur deux affaires qui nous ont particulièrement secoués.


Eddy de Pretto


Il est l’artiste qui, depuis le début de sa carrière, expose ouvertement dans ses textes des problèmes de société tels que l’homophobie et les comportements machistes. Une prise de parti faite par l'artiste qui ne souhaite pas pour autant vouloir être « un porte-drapeau », confiait-il dans une interview accordée à nos confrères de Shoes Up en 2017.


Ses textes sont crus, parlent de sa sexualité et de sa vie, mais cette transparence ne lui a pas apporté que des bonnes choses… En juin 2021, à la suite d’un concert dans l’église Saint-Eustache de Paris, Eddy de Pretto a reçu près de 3.000 messages d’insultes et de menaces de mort sur ses réseaux sociaux. Une plainte a été déposée quelques jours après…


 



 


Il aura fallu un an et demi d'attente pour que le harcèlement subi par Eddy de Pretto soit enfin puni. Du côté de la chanteuse Hoshi, trois années se sont passées sans que rien ne change. En juin prochain, le tribunal va donc  accueillir un seul individu pour une affaire qui en comptait peut-être des milliers... Qu'attend la justice pour se décider enfin à réagir fermement face à ces vagues de haine


Le 7 janvier dernier, c’est Lucas, un adolescent de 13 ans, qui s’est donné la mort dans les Vosges suite au harcèlement homophobe qu’il subissait au sein de son collège. Hoshi était revenue sur cette tragédie en déclarant dans son entretien sur France Inter « J’ai presque l’impression qu’il faut être mort pour faire réagir la justice. Tant que ce n’est que des menaces, ce n’est pas pris au sérieux, mais pourtant ça tue de l’intérieur ».


Il aura fallu un an et demi d'attente pour que le harcèlement subi par Eddy de Pretto soit enfin puni. Du côté de la chanteuse Hoshi, trois années se sont passées. En juin prochain, le tribunal va donc  accueillir un seul individu pour une affaire qui en comptait peut-être des milliers. Pourquoi ce sentiment de lenteur, d'inefficacité ?


Pour mémoire, une loi de 2018 a introduit dans le droit la notion de « cyberharcèlement », désormais puni de deux ans d’emprisonnement et de 30.000 euros d’amende.


Ce texte visait aussi à lutter contre ce qu’ont vécu Hoshi et Eddy de Pretto, le « cyberharcèlement en meute ». Ces « raids », qui sont des attaques coordonnées et simultanées. Depuis 2018 donc, on peut être puni, en participant à ces raids, même avec un seul post, un seul message publié.


Alors où cela bloque ? Dans le temps judiciaire, dans la difficulté à créer des dossiers pour saisir la justice. Un artiste victime de cyberharcèlement doit réunir les messages, ses auteurs (ou pseudos), faire une sorte que soit établi la notion de « meute »). Bref, de quoi jeter l’éponge. Sans même parler de l’organisation même de la justice qui fait que chaque internaute « harceleurs » doit être jugés séparément (ce qui parfois donne le sentiment de procès, à Paris, avec seulement 2, 3, 4 personnes déférées…). Bref, la loi existe, la justice fait probablement ce qu’elle peut et il est naturel que les artistes victimes demandent mieux, demandent un droit plus protecteur.


Restent aux élus à préciser, amender les textes pour renforcer la justice dans son pouvoir d’enquête et de sanctions.