Livestream : les grandes manoeuvres ont commencé !
Publié : 17 février 2021 à 6h00 par Christophe HUBERT
En fermant durablement les lieux festifs, les salles de concerts, les festivals, le Covid-19 a profondément bouleversé le monde de la culture et notre rapport à la musique.
Cherchant à se produire, vaille que vaille, « face » à un public, les artistes ont alors donné un fabuleux coup d’accélérateur aux livestreams, d’abord en se filmant dans leur salon, ensuite avec un plus grand professionnalisme – le Club Azur de Kungs ou les concerts mondiaux de David Guetta par exemple, sans oublier les Happy Hour DJ et Cloud Party de RadioFG, devenus l'outil parfait pour connecter les DJs et leurs publics.
Et le temps deux sera celui d’une consolidation de cette offre nouvelle de spectacle. Le tout jeune Centre National de la Musique vient ainsi de lancer un site spécialement dédié au livestream afin de donner infos et conseils aux artistes, et aux professionnels de la musique.
Pour cela, il faudra trouver une juste place pour les livestreams. Si l'on comprend intuitivement que ces concerts virtuels ne remplaceront jamais le "vrai" concert, on commence à se faire également à l'idée qu'ils pourront venir s’ajouter aux tournées et concerts traditionnels. Sous quelles formes, avec quels moyens, pour proposer quoi ? Tout reste à faire.
« Une aventure d’un genre différent pour les amoureux de la musique »
Dans un article pour la BBC, Alex Taylor évoque, à propos de ces concerts virtuels, la création d’un nouveau genre, prenant exemple sur le DJ Hot Since 82 qui, pour promouvoir son album en plein Covid, a proposé un live en direct d’une montgolfière… devenant l’un des sets les plus vus de 2020.
Les confinements ont forcé les gens à penser différemment dit son manager James Drummond pour qui, le concert en montgolfière, a finalement permis de proposer « une aventure d’un genre différent, pour les amoureux de la musique ».
Différent, innovant, le livestream est également un nouveau champ de la création, d’après cet article (en anglais) qui donne la parole à des spécialistes de la vidéo et du cinéma. En France, l’équipe du Cercle en est un parfait exemple et la jolie illustration que le live, le concert peut sortir renforcé d’une réelle cinématographie (avec les moyens modernes type drones).
Alors, le livestream : concert de l’avenir ?
Pas forcément. Cette fois, c’est Télérama qui s’interroge et qui répond même à la question "non, cela ne marche pas" ! En 2020, des artistes ont testé des concerts virtuels et la recette n’a pas convaincu... les professionnels. Le public visiblement si car il a acheté les billets ! On comprend aisément que, derrière notre écran, nous puissions aimer un concert virtuel, mais le musicien, le chanteur ? Quel plaisir a-t-il de se produire devant une salle vide ?
Et au-delà d'un plaisir qui doit être partagé, est-ce rentable de se produire en virtuel ? La grande question des prochains mois va être : le public est-il prêt à payer durablement ? Serons-nous d’accord par exemple, pour payer un abonnement mensuel à l’une des plateformes qui émergent actuellement comme Open Stage ? Derrière cette question se pose le modèle économique du livestream. Evidemment, on trouvera sympathique le set d'un DJ en Facebook Live, d’aller s’enjailler devant le set de Solomun, au cœur d’un club mal famé de GTA 5… mais tout cela est gratuit !
Le livestream n’en est donc qu’à ses débuts. Et progressivement, l’offre va s’affiner, notre demande également. D’ores et déjà, les géants du secteur commencent à s’activer, d’Universal à Spotify en passant par Soundcloud. Mieux encore : Live Nation, géant mondial du concert est en train de s’y convertir en rachetant Veeps, spécialisé dans la billetterie des livestreams. Sans oublier la FNAC (via Fnac Spectacles), Sony et Riot Games qui s'associent, et bien d’autres… bref, les appétits s’aiguisent.
Du côté des artistes aussi, cela s'active. Des stars mondiales comme Billie Eilish et David Guetta, chacun à leur manière, commencent à créer une frontière entre livestream et concert événement, virtuel ou interactif, en réalité virtuelle ou augmentée. Très vite, on devrait donc faire la différence entre un contenu musical pour lequel il convient de payer, et celui qui n’aurait d’autre voie que la gratuité.
Le marché du streaming vidéo estimé à plus de 42 milliards de dollars
Le CNM – Centre National de la Musique – avance ses statistiques. Selon lui, « le marché du livestream se trouve à l’intersection de deux secteurs […] celui du live musical et celui du streaming vidéo. » Le premier pèse 28 milliards de dollars dans le monde, le second, 42,6 milliards de dollars en 2019. Le public dévorant du livestream, lui, a explosé. Sur la plateforme Twitch, les contenus musicaux sont ainsi passés de 3,6 millions d’heures de visionnage en juillet 2019… à 17,6 millions, un an plus tard !
Les ingrédients sont donc là pour installer durablement le livestream dans notre paysage. Pas à la place du concert, du festival, mais dans une offre complémentaire qui reste à définir.
Et vous, regardez-vous de la musique en livestream ? Seriez-vous prêts à payer pour un concert virtuel ?
[Source]