Ecologie : Comment les festivals se responsabilisent ils ?
27 septembre 2022 à 19h25 par Jean-Baptiste BLANDIN
Festival éco-responsable, clause d’exclusivité, mobilité artistique… Après un été marqué par les incendies et des chaleurs records, la responsabilité écologique des festivals est en marche.
La saison estivale terminée, il est maintenant l’heure de faire le bilan des festivals de l’été. Un bilan établi notamment la semaine dernière lors de la Paris Electronic Week, la convention réunissant de nombreux acteurs de la scène électronique. L’occasion pour nous d’interviewer Noé Thoraval, co-fondateur et directeur artistique du Sarcus Festival, réputé, en plus de sa qualité, pour être un modèle de décroissance.
Durant la crise du Covid, on a eu l’impression que la fête de demain serait différente, plus écologique, plus inclusive, et au final, on se rend compte que ce n’est pas encore tout à fait ça, comment tu expliquerais que cette transition prenne autant de temps ?
Noé Thoraval : Il y a beaucoup d’initiatives qui ont été posées durant la crise du Covid, beaucoup de choses sont en marche. Mais ce qui rend compliqué le changement, c’est le facteur économique. Beaucoup d’acteurs n’ont pas travaillé durant deux ans, donc il faut comprendre ceux qui prennent leur temps pour leur redémarrage, je retiens le positif, les questions sont posées et les réponses commencent à arriver.
En 2022, c’est quoi être un festival écolo ?
Vaste question, je pense qu’aujourd’hui beaucoup ont adopté les principes de base, les éco-cup, le tri des déchets, la mobilité des artistes et du public en maximisant les transports publics. Mais beaucoup vont plus loin en réutilisant les matériaux, notamment pour les scénographies, on retrouve des systèmes sons à énergie solaire. Et ensuite la question de la mobilité se fait à plusieurs échelles mais certains festivals ne font plus que dans le local et ça tend vers ça aujourd’hui. Mais pour moi un festival écolo est un festival, qui en fonction de sa taille, est dans l’intention et avance avec les moyens qu’il a.
Qu’est-ce qui pollue le plus aujourd’hui au sein d’un festival ?
La mobilité des artistes et du public. Certains festivals dans le monde sont encore dans l’absurdité sur ces points, à vanter un dépaysement mais en ne proposant seulement l’avion comme moyen de transport… Avec l’urgence écologique, ça ne devrait plus être possible.
L’autre aspect et la consommation de viande rouge sur un festival. Au sein du Sarcus, on a adopté les repas 100% végétarien (bien qu’on ne le soit pas forcément), ça permet de sensibiliser le public, et on peut aussi limiter ça à la consommation des équipes du festivals, ça sera toujours ça de gagner parce que c'est un désastre en terme d'empreinte carbone.
Tu es un défenseur des circuits courts artistiques et tu as participé à une table ronde autour de la question de la clause d’exclusivité lors de la PEW, alors qu’est-ce que cette clause d’exclusivité ?
La clause d’exclusivité, imagine si tu veux booker Supertramp pour ton festival, du coup, je vais prendre une clause d’exclusivité avec laquelle l'artiste ne pourra pas jouer en France 3 mois avant et 3 mois après mon événement. C’est pour cultiver la rareté de l’artiste et donc venir à mon événement devient la seule solution pour le voir, c’est une assurance de vendre des tickets, mais ça empêche totalement l'artiste de tourner dans une zone géographique donnée, c’est ce qui fait qu’ils parcourent le monde, le jeudi en Suède, le vendredi en Espagne, le samedi aux Etats-Unis… Alors qu’on pourrait rationaliser leurs trajets.
Lors de la PEW, une conférence intitulée « Des aides en plus pour les festivals exemplaires, la bonne solution ? » a été tenue. Pour toi, est-ce que c’est une bonne solution ?
Je pense que ça serait important de monter une grille pour montrer ce qu’est un festival exemplaire et je pense que ça serait bien de les aider parce que d’une part être « exemplaire » coûte plus cher. Par exemple, nous cette année, faire tous les voyages sans avions, c’est absurde, mais ça nous a couté beaucoup plus cher, Paris-Barcelone c’est 4 fois moins cher en avion...
Donc avoir des aides là-dessus seraient les bienvenues puisque lorsque j’en parle à d’autres collègues, ils me disent qu’ils essaient de faire au maximum mais quand y’a 300 euros d'écart sur un billet certains ne peuvent pas se le permettre et c’est normal, surtout sur une économie déjà bien fragilisée par le Covid.
Ça permettrait à des événements d’aller au bout de leur démarche, à faire le dernier geste qu’ils n’auraient pas pu faire sinon.