L’IA, un DJ pas comme les autres…
24 mai 2023 à 8h00 par Christophe HUBERT
L’IA, un DJ pas comme les autres…
Depuis leurs créations, les musiques électroniques et les artistes – DJs, producteurs – n’ont eu de cesse d’innover, tout en samplant, remixant, revisitant, bref, tout consiste à marcher sur deux jambes créatives : d’un côté, l’impulsion de quelque chose de nouveau, de l’autre, la transmission sous de multiples formes d’un héritage bâti par d'autres.
En ce sens, l’électro est sœur de l’intelligence artificielle. Enfin pas tout à fait !
Pas un jour sans que les médias n’inondent les réseaux d’annonces enjouées « L’IA a créé un clip », « L’IA va guérir le cancer », voire « L’IA va mettre un terme à la faim dans le monde ». L’IA non, l’être humain qui l’a conçu, celui qui l’utilisera, certainement. Car à la différence des DJs, l’IA générative ne sait pas innover sans leg, sans héritage. Comprenez, sans alimenter sa base, elle n’aura pas grand-chose à dire. Un artiste peut créer de zéro, l’IA c’est presque impossible, même si le e-learning peut en donner le sentiment (pour être moins définitifs, confions que ces outils sont complexes et évolutifs, peut-être existe-t-il une application capable de créer une oeuvre de zéro ou un aspect technique que nous ne maitrisons pas, cela reste un domaine de spécialistes).
Reste que les milieux culturels (et journalistiques) commencent à se méfier d’une technologie basée sur… la spoliation, le vol de contenus, de voix (souvenez vous du faux son de Drake et The Weeknd) L’IA se nourrit du travail des autres. Quand elle créée un morceau musical, elle le fait sur la base de milliards d’autres, créés pas des humains. Quand elle sort un film ou créée des images, c’est grâce aux éléments de millions de réalisateurs, photographes.
Alors l’IA transmet-elle comme un DJ ? Remixer un classiques funk des années 70 pour l’amener à un nouveau public en 2023, c’est transmettre. Le même son produit par une IA, est-ce pareil. D’évidence non elle n’a pas d’émotions ! Et tout cela, n’est pas qu’une bataille de mots. Soit on estime que l’IA a une visée culturelle et on peut l’encourager, soit l’intention de ses créateurs est de vendre des produits (exemple, des logiciels de création musicale basée sur l’IA ou des music factories qui balanceraient 15000 titres par an) et tout est différent.
L’envolée des contenus sur les nouvelles plateformes et les réseaux sociaux a nourri tout un débat (qui n’est pas réglé) concernant les droits d’auteur. Celui qui créé l’œuvre en reçoit l’éventuelle rémunération, c’est sa propriété. Si Chat GPT et consorts pompent des siècles de connaissances et de créations, qui paye quoi, à qui ? Et si Chat GPT en a le droit, pourquoi un DJ devrait payer un sample, une voix pour créer un remix ? Et si plus personne ne paye rien, comment on finance la culture, la propriété culturelle ? Aux Etats-Unis, ils ont déjà tranché, c'est non, l'IA n'est pas un auteur (à lire ici)
D’où l’idée de Louis Rosenberg, l’un des pontes de l’IA de créer une taxe que paieraient toutes entreprises travaillant avec ces technologies. Taxe pour l’humanité, dit-il, pour le savoir accumulé (à lire ici, en anglais). Et qui pourrait servir... l'humanité.
Les spécialistes de l’IA disent que les musiques électroniques sont celles qui se prêtent le mieux à un développement de l’intelligence artificielle, les plus faciles à travailler, à reproduire. Doit-on s’en réjouir ? En tout cas pour le moment, non, l’IA n’est pas un DJ ni un producteur comme les autres.